Quand il existe des problèmes de culture dans votre entreprise, vous récoltez ce que vous avez semé, soutient Shaun McCarthy dans cet article d’opinion.
Au début des années 90, les banques australiennes ont commencé à s’éloigner d’une « culture du dépôt » classique pour aller vers une « culture orientée vente » plus innovante. En mettant l’accent de plus en plus sur leurs « parts de marché » à travers des produits financiers complémentaires et l’attention portée au service au client, les banques ont été obligées de se transformer en fournisseurs complets de prestations et de conseil, ce qu’elles avaient évité jusqu’alors. Les compagnies d’assurance ont suivi ce modèle dans la foulée.
A la même période, avec l’arrivée de nouvelles technologies, ces organisations se sont mises à externaliser les activités de back-office, pour créer de grands centres d’appels et de traitement centralisés, tout en réduisant considérablement leurs effectifs. En même temps, elles sont passés de l’ancien modèle de polyvalence et de rotation de postes, à ce que l’on a surnommé « la McDonaldisation du secteur bancaire ».
L’accent était mis sur une approche technocratique visant les structures, les systèmes et les technologies pour accroître la performance, plutôt que sur une approche centrée sur les personnes et la culture. Il est fréquent que les sociétés adoptant de telles stratégies de Maconaldisation se persuadent, à tort, que leur réussite est due à leur culture, alors qu’en réalité la culture qu’elles créent finit, au fil du temps, par jouer en leur défaveur.
Une telle stratégie peut produire des résultats commerciaux positifs à court terme, mais à la longue elle produit des conséquences contre productives.
Pour le secteur des services financiers, il semble que ce moment est arrivé.
Trouver l’équilibre
Le moment est venu pour un meilleur équilibre entre les orientations « banque de dépôt » / « société de services et de conseil financiers ». Jusqu’à maintenant la société s’attendait à ce que les banques et les compagnies d’assurance aient les intérêts de leurs clients à cœur. Nous ne considérons pas nos banques comme des vendeurs de produits, mais comme des entités qui sont censées nous aider à atteindre nos objectifs. Les sociétés de services financiers ont su utiliser cette attente à leur avantage à travers la publicité, mais il apparaît que leur « promesse » n’est pas en phase avec leurs convictions fondamentales sur la relation client (qui est un produit de la culture).
Soyons clair sur ce que l’on entend par « culture ». Il s’agit des convictions, des normes et des attentes partagées qui dirigent l’approche des employés dans leur travail et leur manière d’interagir. Elle fixe des standards permettant aux salariés d’ajuster leurs comportements afin de survivre, de s’intégrer et de réussir dans l’entreprise.
La culture se met en place au fil du temps par les systèmes de l’organisation, notamment les systèmes liés à la récompense et à la sanction. L’expression de Peter Drucker « C’est ce que l’on mesure que l’on peut manager » peut aussi être exprimée de la manière suivante « C’est ce que l’on mesure qui compte vraiment. »
Si les objectifs de ventes sont mesurés plus que les objectifs de service, les employés vont vite comprendre que les objectifs de vente sont ce qui compte vraiment.
Vecteurs de culture
Les processus de gestion sur la formation et la définition d’objectifs sont des vecteurs de culture. La manière avec laquelle on apprend aux employés à se comporter et aux managers à manager, crée des attentes sur le comportement souhaité. L’adoption de systèmes de vente et de systèmes d’incitation agressifs est connue pour créer des normes culturelles qui rendent le travail compétitif, où tous les coups sont permis pourvu qu’ils conduisent au succès.
La façon de rétribuer les gens- au sens large- façonne la culture. Les incitations à court terme (que ce soit des bonus pour le personnel ou des stock-options pour les cadres supérieurs) induisent une culture de compétition interne et mettent l’accent sur de rapides victoires passagères, plutôt que sur une constante recherche d’efficacité durable.
Les systèmes de recrutement et de promotion, ainsi que les évaluations de performance, déterminent la culture. Les personnes qui sont promues et les raisons de leurs promotions envoient des signaux importants.
Les leaders forgent la culture. A travers l’exemple, le renforcement positif et d’autres approches de leadership, les leaders, à chaque niveau, impactent la culture de façon singulière. De plus, les convictions portées et affichées par ces leaders ont un impact significatif sur la culture.
Le leadership sculpte la culture. En sus de leurs décisions individuelles, les décisions collectives des groupes de dirigeants ont un impact important sur la culture.
Les systèmes de communication inspirent la culture. La fluidité de circulation de l’information du haut vers le bas de l’organisation et inversement, ainsi que la qualité de l’information qui l’abreuve, impactent ensemble la culture.
Récolter ce que l’on sème
En bref, la culture est le résultat d’une interaction complexe de variables multiples.
Supprimer aveuglément les incitations ne changera pas en soi la culture. Il faudra impérativement informer les intéressés sur les convictions sous-jacentes qui ont entrainé cette décision. Il sera également indispensable de tenir compte de tous les autres facteurs mentionnés ci-dessus.
La culture l’emportera toujours. Ces organisations qui pensent que leurs cultures agressives sont à l’origine de leur succès en payeront un jour les pots cassés. Et pour beaucoup d’organisations, il semble que ce « un jour » est arrivé.
Shaun McCarthy est le Président- Directeur Général de Human Synergistics New Zealand & Australia.